Le voyage de Cilka – Heather Morris

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Résumé de l’éditeur :
Cilka Klein n’a que 16 ans lorsqu’elle est déportée. Très vite remarquée pour sa beauté par le commandant du camp de Birkenau, elle est mise à l’écart des autres prisonnières. Mais à la libération du camp par les Russes, elle est condamnée pour collaboration et envoyée en Sibérie. Un deuxième enfer commence alors pour elle.Au goulag, où elle doit purger une peine de quinze ans, elle se lie d’amitié avec une femme médecin et apprend à s’occuper des malades à l’hôpital. C’est ainsi qu’elle rencontre Alexandr, et qu’elle découvre que l’amour peut naître même dans les situations les plus dramatiques.
Comme pour Le tatoueur d’Auschwitz, Heather Morris a recueilli de nombreux témoignages qu’elle met en scène dans ce nouveau roman très attendu.

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On ne présente plus le roman Le tatoueur d’Auschwitz, il a connu un beau succès et beaucoup l’ont lu. Ce que beaucoup ne savent pas, c’est que Heather Morris a écrit deux autres romans dans la même lignée : Le voyage de Cilka et Les soeurs d’Auschwitz. Deux romans qui s’inspirent de personnages dont l’auteure a connu quand elle a interrogé Lale Solokov, le véritable tatoueur d’Auschwitz. Ici, c’est auprès de Cilka que nous allons découvrir les horreurs autour de la seconde guerre mondiale. Cilka, nous faisions sa connaissance dans le précédent roman et ce qu’elle a vécu à Auschwitz était clairement évoqué sans être toutefois développé, et l’on a bien compris alors les horreurs qu’elle a vécu, mais aussi son rôle dans bien des actions pour aider les autres, il me tardait alors de découvrir son histoire.

Cilka Klein n’a que seize ans lorsque sa vie bascule. Ainsi commence son long périple et une vie atroce liée au despotisme de quelques hommes qui décident de ce qu’il adviendra d’une certaine catégorie de personnes selon leur bon vouloir. Juive, elle se voit commencer alors par une déportation dans un camp de concentration, elle passera alors trois années à Auschwitz, mais cela ne s’arrêtera pas là, si elle survit à ces années, elle sera ensuite condamnée à passer quinze ans dans un goulag en Sibérie. Le récit qui nous est conté au présent représente cette période où elle sera en Sibérie, nous sommes alors confrontés à un nouveau récit qui n’est pas le même que celui du tatoueur d’Auschwitz, c’est intéressant car il nous montre alors une autre facette de l’histoire. Mais son vécu en tant que déporté juive nous est toutefois conté par le biais de chapitres qui évoquent le passé, et nous avons alors un complément d’informations sur ce qu’elle a du surmonter.

Cilka est jeune quand tout débute, et même quand elle se retrouve en Sibérie elle l’est encore, et elle devra encore et toujours survivre. Survivre, c’est le maitre mot de ce à quoi elle est confrontée depuis des années, et il est difficile parfois de ne pas céder à l’envie de tout lâcher et d’arrêter de combattre, d’autant plus quand on est confronté à une situation injuste mais que l’on sait que l’ignominie de l’homme n’a plus aucune limite. Cilka est jeune et belle, et c’est ce qui lui a permis de survivre, mais ce qui est flagrant alors dans les pensées de la jeune femme, c’est ce profond sentiment de culpabilité qui la ronge à l’intérieur et la pousse à ne pas vouloir accepter toutes ces « chances » d’être « mieux » dans l’horreur de ce qu’elle vit. Elle préférerait de son côté payer et souffrir le plus possible pour expier ce qu’elle considère comme des péchés qui font d’elle une mauvaise personne. Cilka a été contrainte de vivre des choses terribles, et elle a vu trop d’horreurs pour être en mesure de les dénombrer, elle a du jouer des rôles difficiles et ce pour survivre, mais aussi pour aider les autres, ceux à qui elle tenait mais pour beaucoup elle s’est donc offert à l’ennemi et Cilka pense qu’elle a mal agi, comme beaucoup autour d’elle. Mais nous, lecteurs nous avons conscience qu’elle n’a pas eu le choix, et que dans son malheur, elle a pu faire le bien pour beaucoup autour d’elle, et cela fait d’elle une personne admirable.

Le récit nous relate tout ce qu’elle a vécu, je crois que l’on peut dire que de survivre à Auschwitz est déjà en soi, une épreuve qui n’est pas quantifiable, tellement elle est éprouvante, douloureuse et difficilement définissable, alors d’imaginer que cette jeune femme a été ensuite jugée coupable d’avoir survécu, pour moi c’est une idée abominable et injuste. Quinze ans de travaux forcés dans un camp en Sibérie, imaginez un peu ce que cela représente, elle n’a même pas vingt ans, sort d’une expérience traumatisante, une expérience qu’elle va taire de peur que l’on ne la juge mal, et elle se retrouve confrontée à un autre emprisonnement dans des conditions atroces. Elle va être encore une fois soumise au bon vouloir des hommes, et elle devra s’habituer à une nouvelle situation. Je suis admirable face à cette personne, qui va savoir s’acclimater et saisir malgré elle, les « chances » qui lui sont offertes de vivre et ce dans des conditions extrêmes.

Le récit est puissant, encore une fois déchirant car il relate des faits difficile et des conditions de vie atroces et inhumaines. Toutes les femmes que nous allons rencontrer ici seront des combattantes et ce de manières différentes, elles ont toutes été condamnées pour des raisons diverses et parfois totalement injustifiées. Elles sont pour beaucoup jeunes et ces années d’emprisonnement leur enlèveront leurs jeunes années qu’elles auraient du vivre pleinement heureuses. A travers chacune d’elle, on évoque des faits qui nous démontrent alors que de grandes puissances sont capables du pire pour atteindre la puissance qu’ils souhaitent avoir dans le monde, face à leurs ennemis. Ces femmes sont considérées comme des traites, des parias qu’il faut punir, et ce dans des conditions extrêmes où elles n’ont aucun droit, pas même le droit à la dignité. Nous ferons la connaissance d’un certain nombre de personnages aux profils différents qui occupent des places différentes dans la hiérarchie de ce camp. Nous découvrirons quelles sont leurs histoires, leurs vécus et ce qu’elles apportent à l’histoire de ce roman.

Cilka feront de nouvelles rencontres, et si elle a bien conscience que de s’accrocher à d’autres peur être destructeur, cela reste pour elle un élément de survie indispensable. Tout ce qu’elle fera sera pour les autres, laissant de côté son propre profit pour aider les autres. A Auschwitz, elle s’était fait des amis qui sont devenus pour elle sa famille, et ici elle rencontrera quelques personnages qui le seront aussi, c’est essentiel pour survivre, surtout quand on a perdu toute sa famille et tout ce qui était sa vie. Cilka est combattante, intelligente aussi et ses compétences lui permettront de faire bien des choses. Elle ne pense pas mériter le bonheur mais malgré tout ce qu’elle vit, il reste une petite étincelle à laquelle elle va se raccrocher et c’est beau de voir que dans le malheur, il est envisageable de penser qu’un jour tout cela sera finit. Quel force de caractère elle a alors qu’elle est si jeune, encore une fois on ne peut être qu’admirable.

Si l’on parle beaucoup des camps de concentration et de la Shoah, les goulags de l’Union Soviétique sous Staline reste moins connu. Leur histoire débute tout de même dans les années 30, ils ont vu bon nombre de personnes déportées dans ces camps, et subir le froid, la faim et la misère qui furent l’arme ultime de ces camps pour tuer ces hommes et femmes qui étaient considérés comme des vermines et des ennemis de l’état. Heather Morris à travers ce roman a souhaité évoquer plusieurs choses, de l’horreur de tout type de déportation et d’emprisonnement injustifié et injuste, elle a souhaité nous dépeindre des conditions de vies inhumaines. De voir que certains ont survécu relève du miracle, alors de constater que Cilka a survécu à deux déportations et à des années de vie si difficiles, reste alors plus qu’admiratif. Cette jeune femme a fait preuve de courage et elle s’est montrée bonne et si généreuse avec les autres. Heather Morris a mis l’accent sur la culpabilité qu’ont pu éprouver les prisonnières qui ont subi des viols durant leurs années d’emprisonnement. Il est difficile d’évoquer ces viols qui vont à l’encontre de l’idéologie des nazis, qui ne supportaient pas l’idée qu’un arien pure souche puisse se salir avec une juive. La honte de ces jeunes femmes fut un poids lourd à porter et elles n’en ont que peu parler, vivant avec la culpabilité de ces actes, s’imaginant qu’elles auraient pu se battre plus pour ne pas les subir. Mais l’on sait alors qu’elles n’avaient pas le choix, mais à cette époque, le jugement des autres étaient alors une arme cruelle et destructrice.

Quand on constate qu’ici on ne lit pas seulement une histoire, mais bien une histoire vraie, on est d’autant plus saisi par l’horreur des actes portés par les hommes sur de jeunes personnes innocentes. L’abomination des camps, quelqu’il soit nous est conté à travers le destin de quelques personnages qui ont réellement exister et malgré tous les témoignages, on a encore du mal à imaginer que de telles horreurs aient pu exister. Le récit est une nouvelle fois poignant, et je trouve que cela est important de mettre ainsi des mots sur ce que le passé a fait, de ne pas taire certaines vérités sur ce que l’homme s’est permis de faire. Heather Morris reste toutefois très modérée dans les descriptions, n’allant pas dans les détails ignobles de ce que ces personnes ont vécu, mais cela n’est pas nécessaire, on a bien conscience du cauchemar qu’ils ont du vivre.

Voilà donc un récit éprouvant, criant de vérités et de vérités qu’il est difficile d’aborder tellement elles sont inhumaines. Quand Heather Morris a rencontré Lale Solokov, elle a enclenché tout un processus de recherches pour avoir le maximum d’informations sur chaque personnage qu’elle évoque dans ses romans, et lire toutes les informations qu’elle nous donne à la fin du roman sur ses enquêtes et sur ses personnes qu’elle nous décrit dans ses romans apporte beaucoup au récit conté.

Le voyage de Cilka 
De Heather Morris
Editions Charleston
Broché 375 pages
Sortie le 14/04/2021

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Retrouver la trilogie autour d’un premier roman Le tatoueur d’Auschwitz.
#1 : Le tatoueur d’Auschwitz (Broché , poche 06/01/2021)
#2 : Le voyage de Cilka (Broché 14/04/2021, poche 09/02/2022)
#3 : Les soeurs d’Auschwitz ( Broché 09/02/2022, poche 04/01/2023)

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