« Ceux qui voulaient voir la mer » de Clarisse Sabard

ceux-qui-voulaient-voir-la-mer

Résumé :
Pour des raisons personnelles, Lilou décide de quitter Paris pour Nice avec son fils, Marius. Et en arrivant dans le Sud, elle ne s’attendait pas à s’attacher à Aurore, cette vieille dame qu’elle croise au parc et qui commence à lui raconter sa vie. Chaque jour, Aurore attend le retour de son amoureux, Albert, parti tenter sa chance à New York après la guerre. Mais malgré sa promesse, il n’est jamais revenu… Lilou décide alors de tout faire pour retrouver le grand amour de son amie. Mais à trop vouloir remuer le passé, le présent ne risque-t-il pas de la rattraper ?

 ★ Merci aux Editions Charleston pour ce SP ★

☆ AVIS DE BELI ☆

C’est toujours avec plaisir que je commence la lecture des romans de Clarisse Sabard, elle n’a pas son pareil pour nous offrir de magnifiques histoires et j’apprécie la façon dont elle mêle le passé au présent. Cela nous rappelle ces périodes bien plus rudes que celle que l’on vit aujourd’hui et cela confère une aura supplémentaire à son récit. Ce que j’apprécie d’autant plus, c’est que malgré l’intensité du récit d’antan, elle arrive aussi à rendre le présent très intéressant. On pourrait croire qu’en comparaison des événements forts et marquants qui ont lieu dans la vie passée de ses personnages, la vie actuelle pourrait paraitre plus « banale » mais elle fait en sorte que l’on s’attache suffisamment à tous ses personnages pour que l’on se laisse embarquer par toutes leurs histoires.

Nous voilà donc lancé en compagnie d’une héroïne, que j’ai apprécié dès le départ : Lilou, une femme qui vit seule avec son fils, Marius. Elle décide de quitter Paris, pour voir la mer et s’installe à Nice, un changement radicale. Elle mène une vie tranquille auprès de son fils qu’elle aime plus que tout, avec son job de bibliothécaire et les quelques amis qu’elle s’est fait. Dit ainsi, cela parait ennuyeux, mais non cette femme est auréolée du bonheur de vivre qui pousse les autres à vouloir la connaitre, j’ai beaucoup apprécié son personnage. A la fois calme et enjouée, elle est une passionnée que nous allons prendre plaisir à suivre et ce malgré quelques blessures du passé qui l’ont profondément marqué. A son contact, se dévoile ainsi la personnalité de ceux et celles qui l’entourent : de ceux réticents à ceux intéressés, elle va faire bien des connaissances de de personnalités toutes différentes les unes des autres. Clarisse Sabard nous offre ainsi un panel de personnages, qui par leurs différences vont apporter leur pierre à l’édifice et nous permettre de passer de très bons moments : certains seront drôles, d’autres attendrissants, tout en passant par des peines, la tristesse ou encore le bonheur !

Encore une fois Clarisse Sabard nous offre un récit très entrainant, dans lequel on tombe et pas moyen de vouloir s’arrêter sans avoir le fin mot de l’histoire. Nous sommes happés par le passé, ce passé qui a tant marqué les esprits avec cette période forte de la seconde guerre mondiale et la déportation des juifs. L’une des héroïnes de ce roman était une enfant juive du temps de la guerre, et c’est son histoire que nous allons découvrir au fil de ses souvenirs qu’elle souhaite retranscrire à sa petite fille, Lucille. Lilou semble être la personne idéale pour recevoir toutes ses confidences et c’est à travers sa découverte que nous allons vivre ce récit. Aurore a perçu en Lilou, cette attention qu’elle sait donner aux autres et cette gentillesse qui lui confrère une oreille pour écouter et être attentive aux autres. Clarisse Sabard utilise une narration à la troisième personne, narration qu’elle maitrise très bien et qui lui permet ainsi de faire intervenir tous ses personnages dans le cheminement de cette histoire. Cela enrichie d’autant plus notre soif de connaissances, pour bien appréhender cette histoire. Chaque personnage intervient au moment opportun pour répondre ainsi aux questions que se pose Lilou, qui sont le reflet des nôtres.

Aurore, c’est cette personne âgée que Lilou va rencontrer au parc. Elle saura alors se montrer très agréable et accueillante et elle va éveiller la curiosité de la jeune femme. Aurore vient tous les jours au parc, toujours au même endroit et semble attendre. Lilou découvrira en discutant avec elle, qu’elle attend bien quelqu’un : cet homme qui fut son amour de jeunesse. Albert qu’elle a connu pendant la seconde guerre mondiale, et dont elle était éperdument amoureuse. Sentiments partagés par le jeune homme, qui est parti à New-York, pour leur permettre de vivre heureux, ensemble, car cela n’était pas possible dans la France d’après guerre. Depuis ce moment-là, elle attend son retour. Une histoire d’amour touchante qui ne peut pas laisser insensible Lilou, qui se sent très émue par cette attente et cette espérance qu’il viendra. Ce passé, nous plonge donc au coeur de la seconde guerre mondiale, lorsque l’occupation de la France par les allemands est aussi synonyme de la déportation des juifs et le déchirement de bien des familles. Aurore en fait partie et nous allons découvrir de quelles façons, elle va vivre cela. Pour parfaire cette histoire, nous allons aussi suivre ces années d’après guerre, où le pays se reconstruit et où les survivants vont tenter de survivre avec leurs souvenirs douloureux. De Nice à New-York, Clarisse Sabard aborde bien des thématiques de l’époque qui nous permettent de très bien comprendre qu’elle était l’ambiance de cette période riche pour chaque pays, qui tente de se relever d’une guerre qui aura laisser bien des marques.

Au delà de découvrir ce passé toujours aussi prenant et passionnant, c’est aussi l’histoire d’un temps présent, d’une femme, Lilou, qui ressent ce besoin d’être elle-même mais aussi de se pardonner des conséquences qu’elle porte sur ses épaules, alors qu’il n’y a pas lieu de se sentir coupable. A travers cette découverte de l’histoire d’Aurore, elle va réussir à se dédouaner d’accusations qu’elle s’attribue depuis toute petite, sur les actes de ses parents. Elle va pouvoir ainsi se laver de cette culpabilité, pardonner encore plus et s’accepter pour s’ouvrir encore plus aux autres et notamment envisager de faire confiance à un homme. J’ai beaucoup apprécié ce personnage féminin, à la fois symbole de la femme, mais aussi de la mère célibataire qui s’occupe seule de son enfant. Elle est déterminée, combattive et très à l’écoute des autres et ce malgré sa réserve sur la confiance qu’elle donne aux autres.

Si le récit parait être sans surprises, c’est bien là une erreur. J’ai été agréablement surprise par la tournure qu’a pris le récit, d’autant plus que je ne m’y attendais pas. J’avançais dans le récit, j’accompagnais Lilou dans ses découvertes, ses recherches, j’ai vécu chaque échec, chaque retour à la case départ avec frustration, colère, peine et toujours ces interrogations sur ce qui a bien pu se passer. Ces moments ont été particulièrement pénibles, quand tous ses efforts ne portaient pas ses fruits, qu’elle avait l’impression de stagner. Cette recherche d’un homme qu’Aurore attend depuis tant d’années a été un vrai travail d’enquête et Lilou s’y est beaucoup investie. Les émotions éprouvées, les sentiments engagés dans cette quête vont être rudement mis à l’épreuve par ses découvertes, et Lilou s’est sentie par bien des moments complètement anéantie. Nous avons pu ressentir la tristesse de certains moments où Clarisse Sabard aborde certains faits qui sont particulièrement durs à accepter, le destin n’étant pas toujours favorable.

C’est toujours un plaisir de lire Clarisse Sabard, elle a ce petit truc qui vous transporte d’emblée dans ses récits. Peut être est-ce cette part de réalité qui nous permet de bien les appréhender, ou encore le fait qu’elle évoque des émotions que l’on serait à même de pouvoir éprouver. Elle arrive aussi à faire en sorte qu’à travers de multiples générations, l’on puisse se sentir concerné par son histoire. Le temps joue un rôle important et j’aime l’idée que l’on nous rappelle l’importance du passé des personnes, car c’est lui qui forge leur caractère mais qui forge aussi le devenir des autres.

J’ai encore une fois succombé à cette magnifique histoire, ou plutôt ces magnifiques histoires, car il ne s’agit pas d’une unique personne abordée, mais de multiples destins et belles vies que nous conte Clarisse Sabard. Sa plume est toujours aussi belle et agréable à lire, elle nous transporte littéralement à travers ses mots dans ces lieux et ces périodes abordées. Nous n’avons aucun mal de passer de l’un à l’autre et prenons plaisir à suivre toutes les histoires proposées, à travers ce fil conducteur de la recherche : la recherche d’un être perdu, comme la recherche de soi-même.

« Ceux qui voulaient voir la mer » de Clarisse Sabard
Editions Charleston le 19/03/2019 : 315 pages

NOTE : 5/5

pcc

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>